L' Histoire de Plobsheim

Des origines au 14e siècle

C'est sous le règne de Charlemagne, roi des Francs, que Plobsheim est mentionné pour la première fois. En effet, en 778, dans son testament, l'évêque Rémi de Strasbourg a fait don à l'Evêché de Strasbourg du couvent d'Eschau ainsi que des possessions y attenant, situées en partie sur le fief de Plobsheim, cité à deux reprises avec les orthographes suivantes : Blabodsaime et Bladbotesheime. 

En 841, lors du partage de l'empire entre les trois fils de Charlemagne, Plobsheim devient seigneurie de l'Empire Germanique et à ce titre, cédée à plusieurs reprises comme gage à des particuliers, vassaux directs de l'Empereur, qui constituaient la "Chevalerie d'Empire de Basse-Alsace". Ses seigneurs successifs font partie des 90 chevaliers d’Empire qui relèvent de l’empereur. Ils ont droit de chasse et de pêche et possèdent un cheval et une armure.

Ainsi les seigneurs et maitres successifs s'appellent, entre autres, Heimbourg von Plobsheim, Mossung, zum Treubel. 

C'est probablement la famille Heimbourg von Plobsheim qui est à l'origine d'un premier château-fort, construit à l'entrée Nord du village. C'était un château-fort flanqué de deux tours, entouré d'un fossé alimenté par le Dorfgiessen. Ce château a été progressivement abandonné après la construction du nouveau château vers 1590 et démoli. Il n'existe plus aujourd'hui.

Etymologie du nom de Plobsheim

D'après Michel Paul Urban, dans son livre "La grande encyclopédie des lieux d'Alsace, deux hypothèses sont possibles :

- « L'habitation du renflement, du bouillonnement » : le village étant situé au bord du Rhin, en zone autrefois inondable lors des crues, sauf la partie centrale du village où a été construit le château. De la racine paléo-européenne BL-AB en dialecte alsacien suivie du suffixe -heim. 

Les orthographes retrouvées sont : Blabodsaime (datée de 778), Plattpotesheim (823) et Bloppoltzheim (1351).

- Du nom d'homme germanique Blabold ou Blabwald, hypothèse non attestée.

L'hypothèse que "Bladbotesheim" aurait pour origine les Blatt Bot, c'est-à-dire les barques à fond plat utilisées par les pêcheurs autrefois est invalidé par plusieurs arguments :
- Était-ce un village de pêcheurs à l'origine ? Il y en avait d'autres tout le long du Rhin et de l'Ill.
- Les barques à fond plat existaient-elle à l'époque de la fondation du village ?
- Il y a aussi le fait que "barque" se dit "Schìff" en alsacien et non Bott, ce qui ne corrobore pas avec la barque à fond plat.

1416 : le fief est donné à la famille Zorn

Un changement important survient en 1416 : l'Empereur Sigismund donne à son tour le fief de Plobsheim à Johann Zorn von Eckerich, Eckerig signifiant « écuyer », c'est-à-dire un noble au service de l’empereur. Le destin de Plobsheim est dorénavant lié à la famille Zorn, et ce, pendant plus de 250 ans, de 1416 à 1684.

Les Zorn vont laisser une empreinte durable dans le village :

- En 1454, Adam Zorn fait construire la chapelle Notre-Dame du Chêne

- En 1533, durant la Réforme, les Zorn font le choix de la religion luthérienne mais ce n'est qu'en 1562 que tous les habitants doivent suivre la nouvelle doctrine. Pendant plus de 120 ans, Plobsheim sera un village protestant. 

- Vers 1590, un nouveau château est édifié pour servir de résidence à la famille Zorn : le château situé au centre de la commune, rue du Général Leclerc. 

- Et au XVIème siècle, la famille Zorn prend le nom de "Zorn von Plobsheim".

Les deux bâtiments construits au 15e et 16e siècles, la chapelle et le château, existent encore et vont garder une place prépondérante dans la vie et le cœur des Plobsheimois.

1618-1648 : la guerre de Trente Ans

En 1618 éclate la guerre de Trente Ans. Les tensions religieuses et sociales sont exacerbées par les difficultés économiques et l'Alsace devient un enjeu politique et le théâtre d'opérations militaires. Plobsheim a sa part de souffrances durant les conflits et les habitants se réfugient à plusieurs reprises dans Strasbourg pour échapper aux troupes belligérantes.

Durant cette guerre, les habitants de Plobsheim fuient à plusieurs reprises vers les remparts d’Erstein, d’Obernai ou de Strasbourg. Les troupes de Mansfeld, mercenaire au service des protestants allemands, vivent sur le dos des habitants en leur prenant leurs vivres. 

Après la signature du traité de Westphalie en 1648, une grande partie de l'Alsace devient française.

1672-1678 : la guerre de Hollande

En 1672 éclate la Guerre dite de Hollande. Durant cette guerre, Plobsheim n’est pas été épargné non plus par les combats que se livrent Turenne côté français et Montecuccoli pour les Impériaux. Strasbourg ayant interdit à Turenne de traverser le Rhin sur le pont de Kehl, il fait construire un pont de bateaux près de Plobsheim le 22 juin 1675. Un mois plus tard, il est tué par un boulet en pleine poitrine, à la bataille de Sasbach en Bade. Les Français reviennent en Alsace et établissent un camp retranché entre Plobsheim et Eschau.

--> A ce sujet voir l'article "Le manoir Güntzer" dans le dossier "Les bâtiments remarquables"

Jusqu’à la Paix de Nimègue en 1678, les troupes françaises et les troupes impériales parcourent l’Alsace, profitant d’une rencontre pour se livrer bataille, mais détruisant volontairement les récoltes pour se ruiner mutuellement. 

Pourtant ce n'est qu'en 1681, lors de la capitulation de Strasbourg devant les troupes de Louis XIV, à l'issue de la campagne d'Alsace, que Strasbourg est rattaché au royaume de France.

1684 : changement de seigneurs à Plobsheim

Le 5 juin 1684, le roi Louis XIV attribue le fief de Plobsheim aux seigneurs Christophe de Güntzer et Nicolas de Kempfer pour les récompenser.

Christophe de Güntzer, agent de la France pour Louvois auprès des magistrats de la ville de Strasbourg, a œuvré pour le rattachement de Strasbourg à la Couronne de France, ainsi que son beau-frère Nicolas de Kempfer, syndic de la chevalerie d’Empire. Les deux nouveaux seigneurs redeviennent catholiques pour plaire à Louis XIV. Leurs fils les suivront, mais leurs épouses resteront protestantes de même que leurs filles. 

Le catholicisme est alors autorisé à nouveau à Plobsheim et l'unique église est utilisée à tour de rôle par la paroisse protestante et la paroisse catholique, dans le cadre du "simultaneum". 

Les Zorn sont dépossédés du fief. Ils seront en procès jusqu’à la Révolution, en vain.Les héritiers de la famille Zorn doivent donc quitter le château et le village. 

Par la suite, les Kempfer rachètent les parts du château aux Güntzer afin de s'y installer. Les Güntzer construisent leur résidence le "Güntzerschloss" en 1705 dans la rue de l'Eglise.

1789 : La Révolution et ses conséquences à Plobsheim

Les familles Kempfer et Güntzer partagent le sort de Plobsheim pendant plus de cent ans mais la Révolution met fin à cette situation : les deux familles perdent leurs privilèges et leurs biens sont confisqués. 

Les Güntzer ayant émigré, leurs biens sont vendus comme biens nationaux après la Révolution. Le manoir est acquis par la famille Lehmann pour en faire leur demeure. Leurs descendants en sont toujours propriétaires.

Le château reste aux mains des Kempfer, mais la famille n'a plus de pouvoir. Il est occupé par leurs descendants jusqu'en 1831.
Anne–Victoire de Kempfer, veuve de Henri Adélaïde de Boistel y décède le 13 mai 1831 et sa fille, la marquise de Rancy, va mettre le château en vente.

1836 : le château devient une mairie-école

La commune de Plobsheim en fait l'acquisition le 23 mai 1836 sous l'égide de son maire André Felz pour servir de mairie-école.

Deux entrées sont alors créées au niveau du perron, la porte de gauche pour les élèves protestants et celle de droite pour les catholiques. Les travaux de transformation sont achevés en 1838. Le bâtiment sert aussi de logement pour les deux enseignants : protestant, catholique, et la mairie est installée au 1er étage. 

 

Le blason de Plobsheim

Au-dessus du perron on peut encore voir le blason de la famille Zorn à gauche ainsi que celui de la famille Kempfer à droite. Entre les deux se trouve le blason de Plobsheim avec ses 3 trèfles. 

Les armoiries de Plobsheim ont été enregistrées vers 1700 à Strasbourg sur ordre de Louis XIV. Mais elles existaient peut-être déjà auparavant. 

Elles se blasonnent ainsi :
« D'argent à la fasce de gueules accompagnées de trois trèfles de sinople, deux en chef et un en pointe. »

Il faut rappeler qu'à l'époque, une grande partie du ban de Plobsheim est encore dédiée aux prés et aux pâturages, zones inondées en période de crue. 

19e siècle : l'arrivée de la famille de Dartein

Le XIXème siècle voit l'arrivée à Plobsheim de la famille de Dartein. Originaire du Périgord, Jean de Dartein est nommé commissaire général des fontes de Strasbourg en 1758. Louis XVI l'anoblit en 1778 et son fils lui succèdera dans sa charge que la Révolution lui conservera. Après avoir fait fortune dans les canons, les de Dartein prennent une nouvelle orientation et investissent dans la forêt. Félix De Dartein achète un lot de forêts (46 ha) sur le ban communal de Plobsheim en 1837.

Cette forêt ayant appartenu aux Kempfer, Jules de Dartein, arrivé au village en 1869, choisit d'appeler le nouveau domaine qu'il fonde en 1890 le Kempferhof. C'est là qu'il fait ériger une petite chapelle de style lombard à côté de son manoir. C'est lui également qui fera construire la route des 7 écluses, (aujourd'hui dans le golf), et la maison de maître située le long de la rue du général Leclerc et plus connue sous le nom de maison de Gail (ou de Dartein). 

Le manoir du « Kempferhof » sert actuellement de bâtiment au golf du même nom.

19e siècle : autres faits marquants

En 1871 Plobsheim redevient allemande de même que toute l'Alsace-Moselle.

Vie religieuse :

En 1872, la paroisse protestante de Plobsheim se scinde en deux. Les « schismatiques » construisent un presbytère en 1873, rue de la Scierie, puis une église juste à côté. 

En 1898, la nouvelle église protestante est inaugurée. Le "simultaneum" prend fin puisque la paroisse protestante officielle a maintenant son église, de même que la paroisse catholique. 

20e siècle : les guerres mondiales

  • La guerre de 1870-1871 épargne relativement la commune avec 4 morts sous uniforme français.

Mais les conséquences de cette guerre sont importantes pour l'Alsace et la Moselle puisqu'elles sont rattachées à l'Allemagne en 1871.
 

  • La guerre de 1914 à 1918 va conduire à la perte sous uniforme allemand 48 jeunes hommes de Plobsheim. 

Plobsheim ainsi que toute l'Alsace-Moselle redevient française à la fin de la 1ère Guerre Mondiale en 1918.
 

  • La commune va être nettement plus impactée par la 2e Guerre Mondiale.

Le 1er septembre 1939, la population de Plobsheim est évacuée en Dordogne, à Port-Sainte-Foy-et-Ponchapt, et y reste pendant presque une année.

Les premières familles reviennent le 9 août 1940, alors que l'Alsace est annexée et nazifiée, Plobsheim occupée par l'armée allemande. Le retour est difficile.
Et plus encore à partir de 1942 quand les jeunes sont incorporés de force dans l'armée allemande ou le Reichsarbeitsdienst par vagues successives.

Le maire de l'époque, Michel Goetz, est démis de ses fonctions par les Allemands en 1942 pour être remplacé par un Plobsheimois nazifié nommé Ortsgruppenleiter, Frédéric Clauss.

Le 28 novembre 1944 à 7h30, la commune est libérée par la 2e division blindée du Général Leclerc.

La paix ne reviendra pas de suite puisque le village est encore touché par des obus allemands tirés de l'autre côté du Rhin début 1945, détruisant quelques maisons au centre du village. Le pont du canal est détruit par un raid aérien allié et les maisons autour du pont ont le toit arraché par le souffle de l'explosion.

L'Alsace-Moselle redevient française le 8 mai 1945. 

Les victimes de cette guerre sont au nombre de 61 : 2 soldats sous uniforme français, 53 soldats sous uniforme allemand dont 51 incorporés de force, et 6 victimes civiles.

Un dossier complet avec de nombreux témoignages des habitants au sujet de la 2e Guerre Mondiale se trouve ici.


 

20e siècle : Plobsheim de 1950 à l'an 2000

Traditionnellement village d'agriculteurs, pêcheurs et artisans, Plobsheim va bien évoluer et grandir au cours des 50 années suivantes.

  • Après la 2e guerre, le 1er étage du château a été utilisé entièrement pour des salles de classe et la mairie s'était repliée dans les combles de l'annexe du château. 
    En 1967, la mairie s'installe dans ses nouveaux locaux : le bâtiment encore actuel situé rue du Moulin. 
     
  • En 1968, la commune rejoint la Communauté Urbaine de Strasbourg (la CUS), renommée Eurométropole le 1er janvier 2015 (EMS). 
     
  • En 1969, EDF va lancer de grands travaux en défrichant la forêt pour mettre en place le plan d'eau. 

Le dédommagement financier va permettre la construction de la salle des fêtes derrière la mairie. 

  • Un grand lotissement va voir le jour dans les années 1975, nommé lotissement du Moulin. D'autres lotissements vont se rajouter au fur et à mesure.


La population va doubler en l'espace de 50 ans : de 1809 habitants en 1946 juste après la guerre, elle va compter 3634 habitants en 1999. 

 

Sources :
- Conférence de Martin Deutsch à l’issue de l’Assemblée Générale du Giessen, 31 mars 2006
- L'histoire de la chapelle Notre-Dame-Du-Chêne par le curé Lagel, traduite en français par Eugène Ortlieb. 
- "Le clergé et les théologiens protestants en Alsace et en Lorraine de la Réforme à nos jours" de Marie-José Bopp
- Ainsi que les nombreux articles écrits au sujet des bâtiments de Plobsheim par les membres du groupe Patrimoine de l'association du Giessen

 

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