Le manoir Güntzer (14 rue de l'église)

Les GÜNTZER

La famille Güntzer est une famille notable protestante luthérienne, jadis répandue dans presque toute l'Alsace, originaire du Val de Villé où elle apparaît au début du 16e siècle, ce qui laisserait penser que son nom est tiré du village de Kintzheim près de Sélestat. Cette famille semble devoir sa fortune et ses armoiries au commerce des bestiaux et au trafic entre l'Alsace et la Lorraine.

En 1628, la famille Güntzer est annoblie : Johann Güntzer, bourgeois de Strasbourg, marchand d'épices, obtient ce privilège. Il est le grand-père de Christophe de Güntzer.

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Christophe de GÜNTZER

Christophe de Güntzer (ou Jean Christophe) est né en 1636.

Docteur en droit à l’issue d’études au Gymnase, puis à l’Université de Strasbourg, il entre au service de la ville à partir de 1671.
Devenu secrétaire du Conseil des XIII en 1675, il est chargé de missions diplomatiques pour lesquelles il doit effectuer de nombreux voyages.

Christophe de Güntzer est promis à un avenir politique relativement modeste. Sa carrière connait pourtant un tournant décisif l’année de l’annexion de la ville libre de Strasbourg : il est l’un des signataires de la capitulation de septembre 1681.

Louis XIV le récompense de ses services en le nommant début octobre 1681 syndic et directeur de la Chancellerie et à ce titre, il assure seul le contrôle du roi sur le Magistrat de Strasbourg.

Il reçoit en 1684 la moitié du village de Plobsheim et son beau-frère Jean Nicolas Kempfer l’autre moitié.

Christophe de Güntzer épouse en 1672 Marguerite Ursule Saladin, fille de pharmacien, puis, après le décès de sa femme, il épouse en 1681 Marguerite Wencker, dont la sœur, Agnès Wencker, a épousé Nicolas Kempfer.

Converti au catholicisme le 9 novembre 1681, Christophe de Güntzer reste aujourd’hui encore une figure contestée de l’histoire de Strasbourg. On a souvent considéré sa promotion comme une récompense pour avoir livré sa ville au roi, sa conversion comme une trahison. En fait, il semblerait que dans une période troublée, Güntzer ait joué un certain rôle modérateur entre le pouvoir royal et le Magistrat.

En 1685 ses fonctions de syndic royal sont redéfinies de fait quand le roi crée en 1685 la charge de préteur royal, attribuée à Ulric Obrecht. Il meurt en décembre 1695 et sera inhumé dans l’église Saint-Etienne.

De l'union entre Christophe de Güntzer et Marguerite Wencker sont issus 3 enfants :
- Marguerite née en 1682, morte en bas-âge
Salomé, née en 1685
Jean, né en 1690
 

Jean de GÜNTZER

Vers 1705, Jean de Güntzer fait construire le manoir à Plobsheim. Ce manoir est construit en briques car il possèdait aussi la tuilerie de Plobsheim, avec ossature en bois, le tout recouvert de crépi. Une pierre encastrée dans le mur de clôture porte l'inscription "HVG" pour "Hans von Güntzer" et l'année 1707.

Jean de Güntzer meurt dans la paroisse Saint-Louis de Strasbourg, son corps est inhumé dans la nef de l’église de Plobsheim dont il est co-seigneur.


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Le manoir Güntzer, quartier général en 1754

En 1754, sous Louis XV, ce manoir sert de quartier général au camp d'entraînement militaire installé entre Plobsheim et Eschau.

Carte du camp de blopsheim stridbeck johann btv1b85920576En 2017, lors de fouilles archéoloqiques à Eschau, des vestiges de ce camp d'entraînement militaire ont été retrouvés. Le camp s'étendait sur le territoire des deux communes et les soldats effectuaient des manoeuvres dans la région. Alignés sur plus de 150 m, il était constitué de dix-huit baraquements ou tentes, certains pourvus de foyers et où l’on peut distinguer des chambres.  Le quartier général était basé dans le manoir Güntzer à Plobsheim.

Ce camp temporaire n'a laissé que peu de traces. Tous les baraquements ou presque conservaient des charbons de bois et des éléments brûlés, généralement des esquilles osseuses d’animaux, quelques tessons de céramique, des fragments de tuyaux de pipe et de rares objets en métal et en verre.

Fouilles 2017 camp militaireFouilles archéologiques menées à Eschau en 2017 Objets fouilles 2017

Objets retrouvés



Les datations C14 et le géo référencement d’une carte manuscrite de l’époque moderne permettent d’identifier que ces vestiges comme faisant partie d’un vaste camp installé en septembre 1754 lors de manœuvres militaires effectuées par l’armée royale française, peu avant la Guerre de Sept ans (1756-1763). Le secteur fouillé semble occupé par l’un des deux bataillons de la brigade d’infanterie D, commandée par Mr de Caux. Les troupes ont stationné à Eschau dans le cadre de manœuvres effectuées le long du Rhin, terre de frontière entre le royaume de France et le Saint-Empire Romain Germanique.

 

 

Suite et fin de l'histoire du manoir Güntzer

A la Révolution, le Güntzerschloss est vendu comme bien national à Jean Valentin Deuchler, meunier de Plobsheim. Sa fille épouse André Feltz, qui sera maire de Plobsheim. Le fils et le petit-fils de ces derniers vont également vivre ici d'où l’appellation actuelle en alsacien "'s Felze Schlessel" (le petit château des Feltz).

Au début du XXe siècle, la famille Lehmann acquiert ce domaine et leurs descendants en sont toujours les propriétaires.

Aujourd'hui des appartements occupent le bâtiment principal tandis qu'une exploitation agricole est installée dans les dépendances.

Sources :

- Archives municipales de Strasbourg, registres paroissiaux, série AA 2625; Archives départementales du Bas-Rhin, 6 E 41 (29); Neue Deutsche Biographie, VII, 1966, p. 280 (bibliographie complète); P. Greissler, «L’évolution de la fonction de syndic du Magistrat de Strasbourg au XVIIe siècle», Annuaire de la Société des Amis du Vieux-Strasbourg, XI, 1981, p. 89.

- https://maisons-de-strasbourg.fr.nf/histoire/index/notices-proprietaires/christophe-guentzer-1672/#syndic