Ce château a été construit avant 1590 par les Zorn, seigneurs de Plobsheim depuis le 15e siècle.

En effet, en 1416, le roi du Saint-Empire romain germanique Sigismond cède le fief de Plobsheim à Johann Zorn von Eckerich . Pendant plus de 250 ans le destin de Plobsheim sera lié à la famille Zorn qui prendra au 16e siècle le nom de « Zorn von Plobsheim ».

Il est mentionné pour la première fois dans les archives paroissiales en 1590 : le baptême des jumelles de Wolfgang Zorn von Plobsheim et Suzanne de Grensing y est célébré. On suppose donc que sa construction était achevée et qu'il était habitable en cette année-là.

 

Un château médiéval se trouvait déjà sur ce fief. Devenu obsolète face aux progrès de l'artillerie, les Zorn de Plobsheim décident au 16e siècle, de construire un nouveau château résidentiel au bord de la route principale du village, et non loin de l'ancien château. Sur le plan partiel du village de 1759  (DRAC Alsace) ci-dessous, on peut distinguer les deux châteaux.

Sans doute des pierres de taille de l’ancien château ont-elles été récupérées pour construire les fondations de celui des Zorn, accélérant de ce fait sa démolition.

Auparavant, en 1454, Adam Zorn avait fait construire la chapelle Notre Dame du Chêne au sud de Plobsheim. Il semblerait que l’argent des pèlerinages à la chapelle aurait permis de financer la construction du nouveau château, le château actuel.

Ce château est de style Renaissance, avec de grandes fenêtres. Il n'a pas eu de rôle défensif, sa vocation étant d'être une résidence dès sa construction.

De plan rectangulaire, il est constitué d'un sous-sol semi-enterré, d'un rez-de chaussée surélevé, d'un étage et de trois niveaux de combles. Une tour pourvue d'une canonnière décorative est accolée à l'angle nord-est. L'accès à la canonnière se fait par une porte à serrure ancienne donnant sur l'extérieur. Des feuillages sculptés ornent les pierres d'angle du rez-de-chaussée de la tour.

Le niveau du plancher de l'étage et des différents combles est marqué par un bandeau en grès surmonté d'une sphère à sa jonction avec le sommet du pignon. 

Autrefois les fenêtres étaient équipées d'un meneau (élément structural vertical divisant la baie en deux). Celles du rez-de-chaussée étaient également pourvues de barreaux.

Des moulures embellissent le plafond de la salle nord-ouest du rez-de-chaussée et celui de la salle nord-est du premier étage.

D'imposants poteaux en chêne soutiennent les poutres de la cave. Une fresque ornant un des murs de la cave, représente des fleurs de lys (emblème des rois de France), des étoiles à cinq branches, une couronne de fleurs, un soleil (Louis 14, dit « le Roi Soleil ») ainsi que deux vases contenant des fleurs.

Les marques des tâcherons, visibles sur les pierres en grès, permettent d'affirmer qu'au minimum dix tailleurs de pierre participèrent à ce chantier.

Sur le plan de 1759, on voit qu'une autre tour abritant un escalier à vis s'élevait au milieu de la façade Est. Cette tour a fait place à un perron à une époque non datée. 

La forte ressemblance de l'hôtel d'Andlau (transformé en centre d'interprétation du patrimoine « Les ateliers de la Seigneurie ») avec le château de Plobsheim en fait un bel exemple sur son état d'origine (tourelle d'escalier, fenêtres à meneau).

Changement de propriétaires en 1684

En 1681, la ville de Strasbourg est rattachée après trente trois années de résistance au royaume de France. Christophe de Güntzer et son beau-frère Jean Nicolas de Kempfer ayant joué un rôle dans cette reddition, Louis XIV leur offre le village de Plobsheim pour les remercier (voir acte de donation ci-dessous). Le 5 juin 1684, Plobsheim est définitivement retiré aux Zorn qui perdent alors leur statut de seigneurs du village et les habitants du château (Georg Wolf Roeder von Diersburg, son épouse Eve Suzanne Zorn von Plobsheim et leurs quatre enfants) doivent le quitter pour faire place aux familles Güntzer et Kempfer. Les Zorn eurent beau protester, leurs revendications seront rejetées par le Conseil souverain d’Alsace à deux reprises, en 1685 et 1714.

Dans le terrier* de 1688-1689, le château est décrit comme suit :
"Le dénommé nouveau château est constitué du château en lui-même, une maison pour l'intendant seigneurial, de bâtiments pour les bêtes, granges, potager, vignoble et verger."

La totalité du terrain entre les rues de la Retraite, du Château, Boistel, et du Général Leclerc (mise à part la maison de la veuve de Jacob Schleyer) appartient à cette époque aux seigneurs de Plobsheim. Une forge seigneuriale, occupée par Hans Michel Metzger, donne alors sur la rue de la Retraite.

En 1775, Jean Baptiste de Kempfer achète les parts de la famille Güntzer pour devenir l'unique propriétaire du château. Ils s’y installent et les Güntzer construisent leur résidence "le Güntzerschloss" en 1705 dans la rue de l’Église.

En 1792, Anne Victoire de Boistel, née Kempfer, cède la château à sa fille , à l'occasion de son mariage avec le Marquis de Rancy, en se réservant la jouissance à vie. Le recensement de 1819 indique que Madame de Boistel y vit avec cinq domestiques. Elle y décède le 13 mai 1831, quelques jours avant son 85e anniversaire. Les meubles du château sont alors transférés à Dijon, lieu de résidence de sa fille.


Explication : 
Le terrier ou papier terrier est un registre qui renferme les lois et usages d'une seigneurie, les droits et conditions des personnes et des biens-fonds dans l'étendue de la seigneurie, les déclarations des censitaires, les baux à cens, les procès-verbaux des limites de justice, le dénombrement de tous les droits de la seigneurie.

Vente du château à la commune en 1836

Le 10 août 1831 une adjudication a lieu dans l'étude d'un notaire strasbourgeois afin de vendre le château mais celui-ci ne trouve pas preneur. Ce n'est qu'en 1836 qu'il est acquis par la commune de Plobsheim sous l’égide du maire André Felz pour la somme de 25 000 francs. A cette époque, l'école communale est en mauvais état et la commune ne possède pas de locaux pour la mairie. Le rez-de-chaussée du château est aménagé pour accueillir deux salles de classe : l'une pour l'école protestante, à gauche, et l'autre pour l'école catholique, à droite. Deux entrées séparées sont créées sur le perron. L'instituteur protestant s'installe dans l'aile ouest tandis que l'instituteur catholique a son logement dans les deux niveaux de la partie nord-ouest du château.

L'aile ouest, ancien logement du directeur, de construction plus récente, existait déjà lors de l'acquisition du château par la commune en 1836. Sur la façade est, la tour avec l'escalier à vis avait déjà été remplacée par le perron et son escalier à double volée.

A l'étage, une grande salle communale prend place dans la partie sud. Les séances du conseil municipal se tiennent dans la salle nord-est. Les archives communales sont stockées entre cette dernière et le logement de l'instituteur catholique. Les travaux de transformation en mairie-école s’achèvent en 1838.

Le mur de clôture en briques (les seigneurs de Plobsheim possédaient aussi une tuilerie) est vendu aux enchères pour procéder à un alignement de la route principale du village, la route dénommée « route de Strasbourg à Bâle ». La cour du château restera ainsi ouverte pendant plus de trente ans jusqu'à la construction de la clôture actuelle (en même temps que le corps de Garde) pour éviter que les animaux des fermes environnantes n'y entrent.

Le jardin, longeant la rue Boistel, est divisé en plusieurs lots et vendu à des particuliers.

Des bâtiments dans la rue de la Retraite sont également vendus puis démolis. Le terrain ainsi libéré devient un potager cultivé par l'instituteur Georges Eck.

En 1859, l'école catholique est scindée en deux : une classe pour les garçons qui reste dans le château et une classe pour les filles qui rejoint l'annexe (ancienne écurie). Le toit mansardé de l'annexe résulte de la transformation en salle de classe et en logement pour Soeur Eugénie, venue du couvent de Saint-Jean-de-Bassel (Moselle).

Après diverses modifications dans l'affectation des salles du château, la mairie occupe provisoirement l'étage de l'annexe de 1950 jusqu’à la construction de la mairie actuelle en 1967. L'école maternelle se trouve alors au rez-de-chaussée de l'annexe.

Des dépendances du château, il ne reste plus que l'ancienne écurie (annexe actuelle du côté sud) et la maison du jardinier (ancien cabinet médical en face). Dans les années 1960, la grange a fait place à des logements pour les enseignants. En 1992, c'est au tour de l'ancien dépôt d'incendie d'être démoli lors de la création de la bibliothèque communale.

D'abord demeure seigneuriale puis mairie-école, et enfin école, le château des Zorn est un bâtiment emblématique, situé au cœur de Plobsheim depuis plus de quatre cents ans et inscrit au titre des monuments historiques depuis 1929. Se pose maintenant la question de lui donner une nouvelle utilité.

Source : Article écrit par Ludovic Seng dans les Rétrospectives 2021 de la commune de Plobsheim

 

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